22 juillet 2007

Je pourrais aussi vous parler de mon âme

Je pourrais vous parler de guerre
des morts en Afrique ou en Irak
du chômage en France des sans abri.

Je pourrais vous parler du gâchis
des inondations des incendies
de la sécheresse et de la messe
du CAC-40 et du couac 2040
(la fin annoncée du pétrole bon marché)
mais aucun éditeur de poésie
ne voudrait de mon poème
toton tontaine, que nenni !

Pourquoi parler de choses vilaines ?

Raconte-moi ton âme profonde
et parle d´oiseaux et de fontaines
et tu n´auras que des amis, poète,
toton tontaine, et quels amis !...

18 juillet 2007

Bougainvillées

Notre grande fenêtre
est devenue un mur
de bougainvillées mauves
qui chatouillent la vitre
effleurent le regard ému
et le fond du baril
de l´âme palpitante
de bonheur disponible.

Rue 120 au Sud de Goiânia
les branches rouge sang
violettes et orange thé
dépassent nonchalantes
le mur des voisins
et s´étendent sur le trottoir
comme mille grappes
de rubis et d´améthystes
et font palpiter de bonheur,
au fond du baril,
l´âme disponible
du poète distrait.

Le bougainvillée comme le lierre
peut grimper sur un arbre
et l´étouffer sous la générosité
dévorante de sa beauté.


Hier je regardais
sur mon écran
des politiciens s´affronter
et, la beauté en moins,
je voyais en eux
toute l´énergie cannibale
du vigoureux bougainvillée
et mon âme disponible
palpitait de peur
du fond noir du coeur
du baril fermé.

Goiânia, avril 2007

14 juillet 2007

Je voudrais pouvoir dire...

Je voudrais pouvoir hurler
comme le vent
de temps à autre
assez, assez, assez
de vos phrases mesurées,
polies, vagues et châtrées !

Comme le vent
je voudrais pouvoir crier
assez de communication
assez de représentation
professionnelle et intéressée
et pour une fois par respect
par amour de la vérité
soyez honnêtes, sincères
et surtout soyez vrais
et
sur la scène surélevée,
derrière des masques
qui cachent les grimaces
j´entends le murmure
indigné des privilégiés :
voyons voyons messieurs
un peu d´ordre dans la salle
gardons, hum, notre dignité !...






C´est alors qu´éclatent
le tonnerre et la foudre
d´une voix autoritaire
pour une fois spontanée
qui part du ventre mou

de l´estrade illuminée :

- Nous n´accepterons pas
l´insolence des provocateurs,
des voyous, des chômeurs
des moins que rien !...
Au nom de notre identité
chassez-les, écrasez-les,
enfermez-les, expulsez-les
dare-dare loin d´où ils sont nés !...

et la foule ébahie et ravie :
- Voilà enfin un homme
qui sait parler vrai,
votons donc pour lui!..

Goiânia, avril 2007.

11 juillet 2007

Hommages aux poètes

Depuis que je suis installé à Goiânia je reçois de multiples gestes de gentillesse de la part des poètes de Goiânia, dont de nombreux dons de livres. Ma bibliothèque est certainement l´une des mieux fournies en poésie contemporaine de l´Etat de Goiás. Je découvre ainsi une variété et une qualité de poésie surprenantes. C´est généralement une poésie raffinée et même parfois érudite, écrite dans un langage d´une telle richesse qu´elle est parfois intraduisible.
Les expressions régionales (14.000), la flore, la faune et la cuisine brésiliennes ajoutent à la langue portugaise un grand nombre de difficultés linguistiques pour le traducteur.
Je viens de finir la traduction du dernier livre de Aidenor Aires “Elégies”. Il est déjà à l´imprimerie. Quel beau livre ! Mais jamais je n´ai autant souffert pour traduire des poèmes. C´est une poésie tellement proche de la réalité latino-américaine qu´il est parfois très difficile de transmettre l´émotion du vécu.
Par ailleurs ma petite anthologie “3+1 (poésie)”, publiée par “Les Amis de Thalie”, rapporte des commentaires plutôt positifs. Je suis heureux d´avoir réussi à réunir, pour la première fois dans un même livre, trois remarquables poètes d´Amérique Latine : Aidenor Aires, Humberto Ak´abal et Rodolfo Alonso.
Oui, décidément je suis heureux de vivre à Goiânia où toute l´année c´est l´été, où la nourriture est variée et toujours délicieuse et où partout l´amabilité et le sourire sont une règle de vie. Le tout en poésie...

09 juillet 2007

Bilan : Goiás et la poésie

Certains pensent que notre déménagement à Goiânia, à l´âge où d´autres réservent une place à la maison de retraite de leur ville, fut quelque peu osé et irréfléchi. Comment peut-on, volontairement, quitter la France, ce beau pays “d´art et d´histoire” comme l´indiquent les panneaux à l´entrée de très nombreux villages, pour un pays “émergent”, c´est-à-dire, en langage clair, un pays sous-développé comme le Brésil ?
D´ailleurs tous les Français qui ont vu “Orpheu negro” et les images télévisées du carnaval de Rio et des favelas, croient pouvoir juger objectivement les conditions de vie des brésiliens pauvres. Certains savent aussi qu´il y a au Brésil des gens immensément riches qui vivent dans des espèces de châteaux forts modernes (les condominiums), gardés jour et nuit, et ne sortant qu´accompagnés de gardes du corps. Par contre la classe moyenne, pourtant nombreuse en Amérique Latine, est généralement effacée de ce scénario, puisque tout le monde croit qu´elle n´existe qu´en France et dans quelques autres pays développés.
Le fait est que, comme partout ailleurs, tout ce qu´il y a d´intéressant et de nouveau en art, en littérature, en musique est principalement l´oeuvre de la classe moyenne. Cette classe moyenne qui, comme en Europe, fait des sacrifices pour s´instruire et pour envoyer ses enfants dans les universités d´Etat et privées.
A Goiânia, par exemple, il y a huit universités, avec des dizaines de milliers d´étudiants et dont au moins 20% des élèves bénéficient de bourses d´études, afin de donner accès aux études supérieures aux enfants des couches sociales les plus défavorisées. Par ailleurs il existe des cours du soir pour les étudiants qui travaillent. L´employée du guichet de la poste qui timbre mes lettres, est en train de passer ses derniers examens de droit pour être avocate et la fille de notre employée de maison travaille dans une boulangerie et suit des cours du soir.
Certains des professeurs d´université et poètes que je connais à Goiânia, on fait ainsi leurs études. Quelques uns étaient même de famille très modeste. Au Brésil, pays nouveau et aujourd´hui relativement prospère, la mobilité sociale existe encore. L´espoir d´une vie meilleure et plus intéressante grâce à l´effort personnel n´est pas un discours édifiant mais une réalité.
La poésie
La poésie, entre autres, occupe une place d´honneur dans cette promotion sociale et intellectuelle. J´ai devant moi le dernier livre de José Mendonça Teles “Dicionário do Escritor Goiano” (Dictionnaire de l´Ecrivain Goianais) avec 1.113 biographies. J´ai même l´honneur d´y figurer, malgré moins de deux ans de résidence à Goiânia ! Quand je compare ceci avec le mépris des français pour la poésie et la lenteur officielle avant de reconnaître la qualité “professionnelle” d´un auteur - souvent post mortem- je dois admettre que j´ai, dans ce domaine, gagné au change.
A Lectoure (Gers), ville de naissance de Pey de Garros, le “père de la renaissance poétique occitane” (±1525-1583), pour mettre une plaque commémorative sur une place, il y a quelques années, c´est une petite association de poésie qui a dû la payer !
A Goiânia la plupart des hommages aux écrivains et poètes se font quand ils sont encore en vie.



Continue.

04 juillet 2007

Le caviar à 6.000 euros !




















Le caviar à 6.000 euros
le kilo
c’est donné...
deux nuits d’hôtel
la robe de ma maîtresse
ma montre inox
et son chien fox
un dîner avec des amis
l’assurance de ma voiture
la pension pour mon ex
une heure au casino
un petit meuble aux puces
une estampe de Beuys
que des broutilles
des broutilles je vous dis
que n’importe qui peut
Se payer
de toute façon l’argent
est fait pour être dépensé
n’est-ce pas ?
le caviar à 6.000 euros
c’est donné
pourquoi s’en priver ?...

01 juillet 2007

Voyage à Montevideo

De retour d´un deuxième voyage à Montevideo (Uruguay) j´aimerais vous raconter quelques rencontres poétiques :
- Dans une librairie j´ai trouvé une grosse anthologie du poète uruguayen Mario Benedetti “Inventario Uno” (poésie complète 1950 à 1985). Ce poète né en 1920 est certainement le plus lu dans toute l´Amérique Latine. Sa poésie est riche, accesible et proche des gens. D´où la grande popularité de cet écrivain engagé qui ne néglige pas de faire des textes pour des chansons populaires.
- J´ai également trouvé un agréable petit livre de Idea Vilariño et un autre de Ida Vitale, deux passionantes femmes poètes uruguayennes contemporaines. D´ailleurs je cherche un moyen pour entrer en rapport avec ces poètes pour avoir l´autorisation de les publier, avec éventuellement quelques autres, dans “Florilège”. Les liens que nous tissons avec l´Uruguay vont peut-être le permettre.
- L´idée est de créer un courant d´échanges culturels entre Montevideo et Goiânia. Plusieurs responsables, des deux côtés, soutiennent ce projet.
- Puis j´ai trouvé, dans une immense librairie, un magnifique livre avec les photos d´un uruguayen Jorge Aramburú et les poèmes de Humberto Ak´abal, un grand poète Maya, qui a pour titre “Guatemala, tejiendo las huellas”, édité par Linardi y Risso à Montevideo.
Chez ce même libraire-éditeur j´ai trouvé, par hasard, un livre bilingue que je cherchais en vain au Brésil “Visión de la poesía brasileña”, réalisé par le renommé poète brésilien Thiago de Melo.
Un voyage riche en découvertes.

Extrait de "Do Brasil", texte écrit pour la revue "Florilège"