29 décembre 2009

La gloire du poète

Mon fils est quelque peu déçu, car le nombre de pages consultées de mon blog reste assez stable ! Depuis sa création , il y a moins de deux ans, plus de 14.000 pages ont été consultées...Si on considère qu´il s´agit de textes personnels sur l´art et sur la poésie et, qui plus est, de poésie politique je pense, au contraire, que le blog : “http://lepoetequivousparle.blogspot.com/”
qu´il a créé pour moi a un succès surprenant.
Comment des gens, certains de façon assez régulière, cherchent, trouvent et consultent, parmi des millions de propositions (qui aujourd´hui n´a pas son blog?...), mes articles et mes poèmes ? C´est un phénomène remarquable et admirable de notre moderne société de communication et j´en suis très reconnaissant.
Reconnaissant à mon fils pour l´avoir créé et pour l´alimenter régulièrement de mes textes. Je suis également reconnaissant à ceux qui le consultent, de temps à autre, car ils m´encouragent à continuer.
Mais quel est l´avantage d´écrire sans espoir de retour ou même de succès ? A quoi peut bien servir de travailler, des heures et des heures, pour envoyer un message poétique à quelques personnes inconnues de plusieurs pays ? N´est-ce pas une curieuse et insolite façon de communiquer avec le monde ? D´ailleurs j´ai, parfois, la sensation qu´il est plus facile de communiquer avec le monde qu´avec nos plus proches voisins.
Les seuls avantages, pour le rédacteur du blog, c´est l´entière liberté de s´exprimer sans contraintes et même, à la grande rigueur, de n´être lu par personne.

26 décembre 2009

Livres vs. écran...

Papier ou écran ? Bibliothèque ou internet ? Plume d´oie ou clavier ? Le monde littéraire est aujourd´hui divisé en deux tendances opposées : pour ou contre l´informatique ! C´est l´éternelle lutte entre la tradition et le progrés technique ! Où est la raison ?...
Il s´agit, comme toujours, d´un conflit de générations. Les plus vieux sont toujours attachés aux techniques qu´ils ont apprises, dans leur jeune âge. Avoir jadis une “belle écriture”et garder soigneusement ses livres était considéré comme un signe de bonne éducation. A l´école, un cahier propre et bien aligné avec des titres soulignés était un distinctif de bon élève. L´écrit restait, pour beaucoup, le privilège d´une élite. On sortait de la condition de paysan par l´écriture. L´écriture et le livre sont donc restés, dans l´imaginaire des plus vieux, comme quelque chose de presque sacré.
J´appartiens moi-même à cette génération qui aime le livre. Certains me suivent depuis plus d´un demi-siècle. Des années plus tard il m´arrive de regretter certains livres que j´ai abandonnés ou perdus lors de mes nombreux déménagements. D´ailleurs, depuis longtemps j´en écris, j´en traduis et j´en publie. Mais j´utilise, indistinctement, l´écriture manuelle traditionnelle ou le clavier de mon ordinateur. Néanmoins, n´étant pas connecté au réseau internet, je continue à utiliser des livres comme référence.
Alors livres ou internet ? Je pense que l´un et l´autre sont utiles et nécessaire. D´ailleurs, les riches connaissances que nous apporte internet, ne viennent-elles pas des nombreux livres publiés chaque année ?

COLERI ET COLERA

Et il y avait des vagues
des vagues et des vogues
et des modes
d'aujourd'hui de demain
en diligence et la chance
des petits chemins
des petits trains

Il y avait plus de nuances
plus de musiciens
sur toutes les routes
et dans chaque coin
et dans chaque cas
coléri et coléra

ce soir je dormirai dans le foin
demain peut-être dans des draps
et je rêverai et tu rêveras
de coquelicots et de mimosa
toujours plus loin
toujours plus au-delà
coléri et coléra

et je rêverai et tu rêveras
de fuir la ville et le froid
là où il n'y a plus de lendemains
là où il a trop de bras
et trop de mains
et comme seul et unique destin
la colère et le choléra.

21 décembre 2009

La puce et le morpion

Une puce vivait ma foi,
sur les fesses d´un roi;
un morpion fort ambitieux
visita sa sous-maîtresse.

Lors de leurs ébats amoureux

le morpion devint roi, aïe !
Et la puce chanoinesse.

20 décembre 2009

L´édition artisanale

L´édition artisanale, à tirage limité, est une solution pour tout poète qui souhaite publier, à peu de frais, quelques exemplaires d´un livre. On peut même éditer un livre unique pour le mettre dans sa bibliothèque ou pour l´offrir à la concierge de notre immeuble pour qu´elle nous admire. On peut également publier un recueil de poèmes, en dix exemplaires, pour le grand public des lecteurs de poésie. Tout est possible avec l´édition artisanale, surtout d´éviter la fréquentation des professionnels de l´édition.
Quels sont les avantages les plus évidents de l´édition artisanale ? J´en cite quelques uns :
1) Vous pouvez modifier votre texte en cours d´édition. Vous pouvez même changer le titre et la couleur de la couverture.
2) L´éditeur ne vous demandera pas un CD Word et d´autres exigences techniques. Quelques photocopies serviront. Vous pourrez même insérer dans votre livre des illustrations ou vos textes manuscrits.
3) Le coût de fabrication de chaque livre (au Brésil), avec couverture rigide et lettres dorées, est inférieur à celui des livres ordinaires en librairie.
L´édition à frais d´auteur est courante et banale en poésie, puisque la poésie ne se vend pas. Mais même l´édition de recueils de poèmes aux frais de l´éditeur est un piège car, si vous souhaitez l´offrir à vos amis ou le faire circuler, vous devrez racheter des livres au “prix de libraire”, ce qui sera généralement plus cher et moins beau que vos propres éditions artisanales.

17 décembre 2009

Indignation

Mon dernier livre de poèmes politiques “Indignation” m´a valu une centaine de lettres, articles ou coups de téléphone. C´est probablement mon plus grand succès. C´est aussi le moins “lyrique” de tous mes livres, par contre il est illustré et en couleur...
Je dénonce dans ce recueil tout ce qui m´insurge et m´écoeure dans la société des trop riches. Dans l´introduction je dis que la guerre, la publicité, la société de consommation, la concentration de voitures dans les villes, l´exploitation abusive des hommes et de la nature sont l´oeuvre du diable. Sartre disait que “l´enfer c´est les autres”, moi j´affirme que l´enfer c´est la conséquence de l´ambition sans frein et sans scrupules de quelques-uns. La recherche frénétique d´accumulation de richesses et de pouvoir de quelques dangereux paranoïaques au détriment de la morale et de toute logique humaine ne peut être que diabolique. Le vocabulaire et le scénario de l´enfer a changé depuis Dante, mais les souffrances qu´il engendre sont aussi épouvantables que celles des flammes. Les victimes des bombardements et de la faim, les sans papiers et les sans logis, les réfugiés de tous les continents savent que l´enfer existe et qu´il est sur terre.
Face aux insuffisances et à l´impuissance politique des organisations humanitaires (les bonnes oeuvres ne sont pas une solution “durable”...), des millions d´ honnêtes gens devraient s´indigner, dénoncer et manifester leur colère. Mais l´avant-garde de cette contestation, ne devrait-elle pas surgir spontanément, comme un geyser, du coeur même des poètes ?...

07 décembre 2009

La pie voleuse

La femme du banquier perdit
son plus beau diamant
l´après-midi d´un lundi ;
le suspect fut son amant...

Mais la grande voleuse était une pie.

Si vous partagez votre lit, aïe !
Fermez la fenêtre et soyez prudent.

25 novembre 2009

Le roseau et le baobab

Il soufflait le vent
le vent d´harmattan;
le roseau pliait pliait
et le baobab en riait.

Comme quoi il ne faut pas toujours croire

aux vieilles histoires coloniales, aïe !
de toubabs et de valets

07 novembre 2009

Le puma et le rat

Dans l´immense Pampa
et la forêt vierge
le puma était roi
et le rat concierge.

Un jour le puma tomba dans un piège.

Le rat félon en profita, aïe !
pour prendre la place du Roi.

04 novembre 2009

Le poète cherche le poème...

Le poète se torture les neurones et puise dans ses fragiles réserves de sensibilité tout ce qui peut être transformé en poèmes. Le poème resiste. Le poème ne vient pas. Le poème, malgré son apparente simplicité, est une forêt qui cache des milliers d´espèces rares et fuyantes qui se dissimulent dans le feuillage : les mots. Un mot de trop ou de moins et le poème n´est plus. Le poème joue sans cesse à cache-cache avec le poète. Chacun creuse les souvenirs pour trouver un brin d´émotion dans l´amour, dans les déceptions, dans l´espoir, mais le poème ne vient pas. Tous les vrais poètes, cherchent pendant des jours, parfois des années, les mots qui expriment l´instant de tendresse, le frisson, la larme au coin de l´il, mais le vide s´obstine. Le poème est souvent le pire ennemi du poète car il est toujours insaisissable, capricieux et ingrat. Je dirai même que plus le poète s´adonne à sa passion poétique moins il a de chance de rencontrer le poème.
Je ne me souviens plus qui disait que plus le poète se professionnalise moins il devient poète. En lisant, jour après jour, “Les meilleurs poèmes de langue française” on ne devient pas un meilleur poète. Et encore moins en ne les lisant pas. Alors comment devenir poète ? Comment saisir le poème ? C´est le grand mystère de la poésie !
On ne devient pas poète à l´université. On naît poète comme on naît virtuose. Sauf que le virtuose s´entraîne pendant des heures et des années pour le devenir. Le poète ne peut qu´attendre, patiemment, l´arrivée du bon poème tout en écrivant, jour après jour, des mauvais. Et peut-être un jour...oui, peut-être...

31 octobre 2009

La rosée

Un matin blême
j´ai trouvé sur le rosier
un petit poème
dans une goutte de rosée.

Le poème était un arc-en-ciel.

Mais le soleil, aïe !
me l´a enlevé.

30 octobre 2009

L´escargot et le lapin

Un escargot rencontra un lapin
dans la cour d´un cuisinier ;
l´escargot proposa au lapin
de l´aider à s´échapper.

Le gentil lapin en fut fort ému...

Mais tout deux le lendemain, aïe !
étaient sur le menu.

29 octobre 2009

Le riche et le pauvre

Un pauvre dans une rue pourrie
mendiait du matin au soir ;
un homme très riche le vit
et il changea de trottoir.

Cette histoire est tellement triste et vraie...

Qu´il vaut mieux être riche, aïe !
et en très bonne santé.

25 octobre 2009

Ecrivains d´aujourd´hui (suite) - Grasset 1960 -

Jean-Paul Sartre
(Lettre à Roger Garaudy)

“Le marxisme est à faire. Marx et Engels ont donné des tâches infinies à tous les intellectuels de leur temps et du nôtre. Les difficiles combats - que les travailleurs ont dû mener - ont eu pour résultat de laisser ces tâches à l´état de simple indication. Le marxisme devait être conquérant : il ne l´est pas ; il se cantonne sur la défensive. (...) Il devait à lui seul être la raison historique et la culture de notre temps : il ne l´est pas. (...) Il devait enfin établir et fonder ses droits et sa portée, c´est-à.dire montrer ce que doit être une Vérité dialectique et une praxis. Rien n´a été fait ni même tenté. Entre les connaissances sans fondement de la pensée bourgeoise et le fondement sans connaissance qu´est resté le matérialisme historique, notre siècle demeure - les sciences exactes mises à part - celui du non-savoir.”

Note : J´ai eu l´occasion, en 1964, de voir une interview de Sartre lors de son refus du prix Nobel. J´ai été alors saisi par la richesse et la grande clarté de ses arguments. Entre autres il déclara qu´il aurait accepté avec plaisir le prix Nobel quand il se battait, en France, pour la paix en Algérie car il aurait été utile à sa lutte politique, mais que ce prix arrivait trop tard et qu´il n´ajouterait rien à sa renommée. Il pourrait même lui être préjudiciable car il le figerait parmi les notables de la littérature et qu´il voulait rester libre de ses actes.

20 octobre 2009

La puce à l´oreille

Une puce attentive et sensible
écoutait une valse de Chopin
dans l´oreille indifférente
d´un gros et méchant chien.

Que faire quand on est une puce mélomane ?

Que faire pour que les chiens, aïe !
ne soient pas aussi des ânes ?

18 octobre 2009

Le renard et le raisin

Il y avait un fin renard
qui aimait le bon raisin
c´est ainsi que tous les soirs
il volait celui du voisin.

La morale de cette histoire est navrante :

Si vous n´avez pas de thé à la menthe, aïe !
Buvez du vin...

14 octobre 2009

Ecrivains d´aujourd´hui (suite) - Grasset 1960 -

Aimé Césaire
(Cahier d´un retour au pays natal - fragment-)

Partir
Comme il y a des hommes-hyènes et des hommes
panthère, je serais un homme-juif
un homme-cafre
un homme-hindou-de-Calcutta
un homme-de-Harlem-qui-ne vote pas.

L´homme-famine, l´homme insulte, l´homme-torture on pouvait à n´importe quel moment le saisir le rouer de coups le tuer - parfaitement le tuer - sans avoir de compte à rendre à personne sans avoir d´excuse à présenter à personne

un homme-juif
un homme-pogrom
un mendigot

Note : On ne dit pas assez que Aimé Césaire était l´un des plus grands poètes du XXème siècle. Noir, surréaliste, marxiste, engagé toute sa vie dans la lutte politique, il était un modèle d´intellectuel progressiste à une époque où la France était, pour beaucoup, le phare de l´intelligence. Pourquoi n´a-t-il pas eu le prix Nobel ?
Parce qu´il fut communiste ou parce que tout simplement il était français ? Je pense que le refus du prix, en 1964, par J.-P. Sartre fut mal digéré par l´Académie suédoise...

08 octobre 2009

Point de vue par Robert Kanter

“Pour (la) survie de la littérature, une révolution politique et sociale est-elle nécessaire ? Il est tentant de faire un parallèle entre la décomposition de l´écriture et la décomposition de la bourgeoisie et de lier de la littérature à la mort d´une classe et au devenir d´une société. Mais cela ne résout pas le problème, cela le laisse à résoudre par l´événement dont aucun déterminisme, aucun exemple ne nous permet de prédire qu´il sera.”

Note : La concentration capitaliste des maisons d´édition parisiennes, la spécialisation des collections et un développement agressif du marketing sont les seules révolutions que nous avons pu observer dans ce domaine - comme dans bien d´autres -. La bourgeoisie, loin de dépérir, comme l´évoquait R. Kanter, à utilisé tous les moyens techniques et financiers modernes pour renforcer sa position dominante. Les écrivains professionnels, comme pendant la guerre, se sont adaptés à l´air du temps: ils sont devenus apolitiques et même, certains, par vocation ou par opportunisme, férocement anti-marxistes, c´est-à-dire contre tout espoir de progrès social.
Au nom de la liberté d´expression, tout débat contradictoire sur les grandes orientations de la politique officielle est devenu inconvenant et même ridicule.

05 octobre 2009

Le rosier et le nid

Sur la terrasse de ma maison
il y avait un gros chat gris
et dans la plus belle saison
un rose rosier cachait un nid.

Chacun cherchait, sans façons, à vivre sa vie.

Mais si le chat sortait ses griffes, aïe !
le touffu rosier aussi.

03 octobre 2009

L´hippopotame et le scorpion

Dans une mare d´Afrique
un hippopotame pataugeait ;
un scorpion technocratique
voulait la mare traverser :

Nous allons construire un pont et apporter le progrès...

Les blancs asséchèrent la mare, aïe !
et l´hippopotame dût déménager..

24 septembre 2009

Ecrivains d´aujourd´hui

Dans un très intéressant dictionnaire anthologique et critique “Ecrivains d´aujourd´hui” (1940-1960) édité par Grasset, en 1960, je viens de retrouver un texte de François Nourissier. Il s´agit d´un long article de présentation, “Le monde du livre”, qui permet de mesurer le chemin qualitatif parcouru par l´édition de livres de littérature, en France, en 50 ans. Je note que les observations et les révélations de Nourissier, sur le monde de l´édition d´alors, n´ont guère vieilli. Voici ce qu´il nous dit (page 41) :
”En gros ceci : que nos lettres sont parisiennes, bourgeoises, et que les professeurs y disputent la prépondérance aux hommes de lettres. Nous avons une littérature de classe aisée, étroitement liée à la vie parisienne, livrée aux professionnels du livre et des idées. Nous avons une littérature fermée. Comme d´autre part l´écrivain, en France, est particulièrement respecté et honoré, on voit mal se dessiner un bouleversement prochain de ces conditions. L´écrivain français est par définition un tenant de l´ordre établi, et son bénéficiaire. Sur ce point les apparences ne doivent point tromper : tel qui fit profession d´anarchie, d´illégalité, de révolte ce sont les mêmes salons qui les reçoivent, les mêmes académiciens qui le commentent que n´importe quel bien-pensant officiel. La bourgeoisie absorbe et assimile tout, et le plus brûlant avec une particulière dilection.
Les Galligrasseuil qui ont racheté, depuis, tous les principaux éditeurs indépendants qui pouvaient leur faire de l´ombre, restent les meilleurs garants de la continuité.

20 septembre 2009

Le crapaud et le boeuf

Un boeuf gras et sans soucis
ruminait l´herbe tendre du matin ;
un crapaud caché près d´un puits
enviait son poil et son embonpoint.

Mais le crapaud changea bientôt d´avis...

Quand il vit passer le camion du boucher, aïe !
il comprit que l´envie est un vilain pêché.

16 septembre 2009

Le lézard et la couleuvre

Le lézard, vilain petit dragon,
se prélasse sur le muret du jardin ;
et gobe mouches et moucherons
sous le regard bienveillant du voisin.
.
C´est que le lézard, lui, a une bonne renommée...

La couleuvre aussi voudrait être aimée mais , aïe !
elle à une cousine venin.

12 septembre 2009

La rivière murmurante

J´ai connu quand j´étais enfant
des rivières d´eau limpide
au courant vif et pétillant.
On y voyait le fond sans rides

et de nombreux petits poissons d´or et d´argent.

Le progrès apporta des détergents très sophistiqués, aïe !
la rivière est maintenant bien polluée.

05 septembre 2009

La Nouvelle Revue Française

Je viens de relire certaines des chroniques, des notes et des nouvelles de la “Nouvelle Revue Française” du 1er mai 1956. C´était le numéro 41. En première partie des textes de Henri Michaux, Franz Kafka, Jean Grosjean (un poète “classique”- et oublié - de Gallimard), Cioran et Jacques Audiberti. 50 ans plus tard, exception faite de Grosjean, tous sont encore lus, étudiés et admirés par l´intellectualité française et internationale. Une revue mensuelle de 960 pages (!) qui parle de culture, d´art, de livres, de poésie, de musique, de politique (et oui, de politique ! car alors il y avait un vrai débat entre la droite cultivée et les intellectuels communistes). On pouvait, en lisant la NRF, se faire une opinion sur le haut niveau de la pensée française. La droite intelligente n´avait pas tort dans ses critiques du stalinisme et la gauche avait de justes raisons pour critiquer les méfaits du capitalisme. Les analyses nuancées, des uns et des autres, nous obligeaient à penser juste et à éviter les opinions trop tranchantes, trop extrêmes, trop sommaires de tous les fascismes de droite ou de gauche.
Où sont aujourd´hui les revues et les chroniques culturelles ouvertes au débat et respectueuses de la diversité d´opinions ? Où sont les intellectuels capables de défendre leurs idées, leurs utopies, leurs rêves de liberté et de justice contre la puissance de la “pensée unique” créée dans les ateliers à penser des banques et entreprises transnationales ? Qu´est devenu la “culture” française et celle du monde “moderne” en général ? Où trouve-t-on les “Nouvelle Revue Française” du XXIème siècle ?...

04 septembre 2009

Le corbeau et le renard

Le corbeau, noir comme un corbeau
portait dans son bec un diamant ;
pris de soif il voulu boire au ruisseau
et le bijou se perdit dans le courant.

Le renard à l´affût portait dans sa gueule un tamis.

C´est ainsi qu´un prêteur à gage s´enrichit, aïe !
la fortune sourit rarement aux plus sots.

30 août 2009

Une exposition historique ?...

Malu da Cunha, fine organisatrice d´expositions de Goiânia, a une fois de plus réussi un pari : réunir, dans une même exposition, les quatre artistes les plus renommés de l´Etat de Goiás. Ces artistes sont : Antonio Poteiro, G. Fogaça, Siron Franco et Waldomiro de Deus.
Dans l´espace culturel du Tribunal Régional du Travail (comme quoi tout est possible au Brésil !...) a eu lieu la première d´une série d´expositions itinérantes.
Antonio Poteiro, le plus âgé, est sculpteur et peintre. Ses tableaux naïfs représentent, généralement, des foules d´enfants en fête et des animaux fantastiques dans un style libre et spontané mais très personnel.
G. Fogaça, peint de grandes villes contemporaines avec des rues saturées de voitures et d´une foule anonyme de piétons. Ses paysages toujours nocturnes, expriment magistralement, par de violentes touches de couleurs, l´agitation et l´angoisse des villes modernes.
Je n´ai jamais rencontré Siron Franco mais j´ai vu plusieurs de ses oeuvres et je suis encore perplexe par leurs diversité de style et d´inspiration. Parfois très d´avant-garde et d´autres fois presque classique, il est difficile de porter un jugement sur son travail sans bien connaître son évolution et ses motivations profondes.
Waldomiro de Deus a un long et riche parcours international. Il peut être considéré comme un peintre naïf du “réalisme social brésilien”. Son oeuvre a toujours, quelque part, un fort contenu humain et social.
Hors des modes, ces quatre artistes représentent le Brésil que j´aime : celui qui s´assume dans sa diversité...

26 août 2009

La cigale et la fourmi (2)

La cigale chantait tous les soirs
dans un élégant cabaret
elle buvait de l étiquette noire
et créchait à Saint-Tropez.

La fourmi, elle, trimait dur à l´usine des Sans-Gloire,

elle gagnait juste sa croûte et son loyer, aïe !
La Fontaine, lui, n´avait jamais pointé...

23 août 2009

Le laboureur et ses enfants

Le travail c´est la santé
répétait un riche paysan...
Il est mort de tant travailler
à moins de cinquante ans.

L´héritage fut vite dépensé par ses enfants.

Si vous voulez vivre heureux, aïe !
faites travailler les vieux.

20 août 2009

Les poètes sont-ils responsables de la crise ?...

Rimbaud, Lautréamont, Alfred Jarry, Tristan Tzara, André Breton se révoltaient contre la médiocrité étouffante de la culture bourgeoise de leur époque. En mai 1968 cette révolte sortit dans la rue avec des pavés à la main et des idées de liberté sur les murs. Pendant quelques semaines les bourgeois eurent très peur, les fascistes s´indignèrent et les dociles moutons, toujours aussi nombreux, ne savaient plus dans quelle prairie devaient-ils paître. Mais, après quelques réformes de surface, tout reprit comme avant. La routine aliénante du travail, les crédits de la voiture et du trois pièces et les vacances en troupeau organisé reprirent le dessus. Métro-boulot-dodo dénonçait le poète Pierre Béarn que j´ai rencontré, une fois, au “Marché de la Poésie” Place Saint-Sulpice, très vieux et très seul devant ses livres.
Les vrais questions de mai 68 furent promptement oubliées par les responsables de la politique et par les idéologues professionnels. Et c´est quarante ans plus tard que les effets pervers de notre société de consommateurs et de pollueurs égoïstes, sans respect pour les générations futures et uniquement motivée par la rentabilité immédiat, mettent en évidence son pouvoir destructeur. Destructeur de certitudes, d´emplois et de sécurité pour tous, mais surtout pour les plus faibles. Tout le système s´écroule, et les “responsables”politiques proposent de boucher les trous avec la rustine des vélos de nos grands-parents.
Mais où sont donc les Rimbaud, les Lautréamont, les Jarry, les Tzara et les Breton de notre siècle ? Où est donc la conscience sociale de nos poètes d´aujourd´hui ?

17 août 2009

Comment devenir (très) riche...

D´après un article dans “Paris Art” de septembre 2008, l´acteur Hugh Grant aurait acheté en 1977 une oeuvre de Warhol, le portrait d´Elisabeth Taylor, pour 3,6 millions de dollars et l´aurait revendu, six ans plus tard, aux enchères chez Christie´s, pour 21 millions de dollars ! Voici une manière de devenir riche sans beaucoup se fatiguer ! Mais, vous pouvez aussi me signaler qu´il fallait pouvoir disposer de 3,6 millions de dollars pour l´achat d´un tableau d´un jeune artiste !...Tous le monde ne peut pas dépenser de telles sommes d´argent ; par contre beaucoup de salariés peuvent économiser 30 euros par mois (le prix de cinq paquets de cigarettes) pour acheter, à la fin de l´année, une oeuvre d´art pour 360 euros.
Vous pouvez, pour 360 euros, trouver d´excellentes gravures et même des dessins de jeunes artistes qui ont déjà un parcours intéressant d´expositions internationales. Plus vous serez nombreux à soutenir quelques jeunes artistes, plus vous augmenterez leur chance de voir leur renommée et leurs prix grimper. Puis, il ne faut pas négliger le plaisir d´avoir des oeuvres de qualité sur les murs. Et même si l´évolution de la carrière d´un artiste vous déçoit ceci ne signifie absolument pas que vous vous soyez trompé sur la qualité de son oeuvre. Les facteurs de réussite commerciale, dans ce domaine, restent très mystérieux. Sur 100 artistes de la même génération, avec le même talent et le même parcours, il y en aura toujours un qui réussira mieux que les autres.
De toutes façons le collectionneur de jeunes artistes sera toujours gagnant.

09 août 2009

Le papillon et l´éléphant

Sur le dos dodu d´un éléphant
au milieu de l´exsangue forêt
se pose un papillon blanc
le prenant pour un rocher.

Le pachyderme furieux se roule dans la boue...

Si vous n´êtes pas invité, aïe !
méfiez-vous des gros fous..

02 août 2009

Les tourterelles fidèles

Tous les matins je regarde
sur les branches de l´acacia
un couple de jolies tourterelles
et je pense, ému, à Toi et Moi.

Je pense à tant d´années vécues sous le même toit

avec nos livres, nos amis et nos chats, aïe !
que ferais-je sans toi ?

31 juillet 2009

Les chats et le patron

J´ai besoin de quelques chats
pour préserver mes sacs de grain,
mais si les chats sont trop gras
les souris continueront leur festin.

C´est ainsi que le meunier apprécie ses employés :

Il affirme qu´un ouvrier trop payé, aïe !
Il n´a plus envie de travailler.

27 juillet 2009

Il y a toujours un passé...


Fogaça

Un touriste à Goias

Même dans un pays en devenir, comme le Brésil, il y a des gens qui ne parlent que de traditions et du passé. La plus vieille maison de Goiânia a moins de 70 ans et certains voudraient déjà que tous les vieux bâtiments deviennent des “monuments historiques” à l´image de l´ancienne capitale Goiás. Sur les dix propositions de la “nouvelle politique culturelle” du Gouvernement de l´Etat de Goiás (Jornal da Cultura Goiana - sept. 2008) la moitié semblent plus orientées vers la “conservation” que vers l´expérimentation et la création culturelle.
C´est aussi, en grande partie, l´option culturelle de la France. Mais en France chaque coin du pays est un morceau d´une très longue histoire. La maison en pierres que j´habitais dans le Sud de la France avait plus de 200 ans et était construite sur des fondations romaines qui en avait 2.000. Partout où on creusait on trouvait des restes archéologiques ! Ce qui peut être considéré comme une richesse peut aussi être un frein. Si la ville de Lectoure avait eu la même croissance démographique que Goiânia elle serait aujourd´hui plus grande que Paris !!! Et Goiás “velho”, malgré sa reconnaissance de ville historique par l´UNESCO, reste une ville qui végète.
Quand je vais à Goiás, avec des amis étrangers, il m´arrive de demander : “Ou se trouve le musée où on peut voir les oeuvres de Ana Maria Pacheco, Siron Franco et Fogaça, tous trois né à Goiás ?”. Bien entendu personne ne peut me répondre car ces artistes modernes, malgré leur renommée, ne sont guère sollicités pour exposer leurs oeuvres dans cette ville anesthésiée par son passé.

23 juillet 2009

La poésie et la politique

Je viens de recevoir “Le journal des poètes” - le
nº 3 de 2008 - qui est, je pense, l´une des plus anciennes revues de poésie d´Europe. Elle existe depuis 77 ans ! Cette revue, publiée par la “Maison Internationale de la Poésie” à Bruxelles, trimestrielle, avec son format 30 x 40 cm et ses 10 pages, publie un grand nombre de poèmes et d´articles concernant la poésie, surtout francophone et européenne. C´est une belle revue, subventionnée, qui pourrait servir d´exemple, par le soin de sa présentation et par sa qualité littéraire à d´autres éditeurs de poésie si, par son contenu, cette revue n´était pas aussi conventionnelle et ennuyeuse. Elle semble conçue dans le seul but de ne heurter personne. En pleine crise financière, économique et sociale, tout ce qu´elle publie est d´une stricte neutralité... apolitique. J´ai dit “politique” ? Oh, pardon ! J´oubliais presque qu´il s´agit d´une revue de poésie !
Le monde succombe sous les bombes, les cataclysmes, les famines pendant que de doux et innocents poètes imaginent et ne nous parlent que de fleurs des champs, d´oiseaux sauvages et de ruisseaux d´eau claire, ignorant même qu´ils sont en voie d´extinction. Où est donc la sensibilité humaine de ces tisseurs de jolis mots éthérés, introspectifs et vide de sens? Qui leur a dit que fermer les yeux à la réalité, à la souffrance des hommes est “poétique”?
L´évasion par la poésie se justifie en temps de paix et de fraternité car elle peut être un baume à nos petits malheurs ; mais en temps de guerre, de violences et de crimes elle n´est qu´une preuve d´irresponsabilité sociale.

18 juillet 2009

Les bêtes sauvages

J´ai toujours admiré la grâce
du lézard et du colibri ;
j´aime les plantes grasses
et les fleurs de la prairie.

J´aime aussi les fourmis, les abeilles et les souris
J´aime tout ce qui est sauvages mais, aïe !

loin, très loin de mon lit.

14 juillet 2009

La cigale et la fourmi (1)

Il y avait il y a longtemps
un prétentieux fabuliste
qui ennuyait les enfants
avec des fables tristes.

Quand dira-t-on aux maîtres et aux parents ? :

Assez de cigales, assez de fourmis, Aïe !
Nous voulons de la vraie poésie !

11 juillet 2009

Le perroquet et le canari

Face aux cages d´une oisellerie
très chic de Roubaix
un riche client hésitait
entre un perroquet et un canari

Il hésitait entre le chant et la couleur.

Sa vieille usine ayant été délocalisée, aïe !
il prit la jeune fille de l´oiseleur.

05 juillet 2009

Le pécari et le cochon

En bordure de la forêt un pécari
rencontra un jeune cochon ;
et il lui dit : toi, mon bon ami,
tu as une vraie gueule de jambon.

Méfiez-vous des lointains cousins sauvages...

Ils ne savent rien des bons usages, Aïe ! :
ils ne fréquentent pas les charcuteries.

04 juillet 2009

Les fables

A notre chat Charlie et à tous les chats, chiens, pigeons, perroquets et gazelles qui agrémentèrent notre vie de leur affection discrète.




Esope, ver le VIème siècle av.J.C., aurait été le premier à faire le malin, en attribuant, dans ses vers, les vices des êtres humains aux animaux. Je ne vois pas très bien le rapport, mais il mourut assassiné par des prêtres (de la SPA ?...). Plus tard des écrivains européens, toujours à l´affût de l´imitation et du plagiat, reprirent et actualisèrent, sans états d´âme, ses textes.
Le plus célèbre des suiveurs, car proche du Roi de France, fut La Fontaine. Je ne sais pas s´il connaissait tellement les animaux mais, sur les vices, il était extrêmement bien informé par les moeurs de la cour. L´un des derniers fabulistes français est le brave Pierre Béarn qui, dans sa librairie, ne fréquentait guère les bêtes ni les courtisans mais, dû à son grand âge, il connaissait certainement bien les hommes.
Si aujourd´hui j´ose reprendre cette vieille idée, de donner une âme aux bêtes, c´est par amusement et aussi pour me rappeler que j´ai souvent rencontré plus d´affection, de fidélité et de reconnaissance dans les animaux que dans beaucoup d´hommes.
Par ailleurs que pourrions-nous dire de l´exploitation inhumaine des animaux pas l´homme ! Jamais les bêtes sauvages n´ont montré autant de cruauté envers les hommes qui les dépossèdent, pourtant, de tout leur espace naturel de survie. N´est-ce pas l´homme civilisé qui a inventé la chasse sportive, l´élevage en batterie et les cages pour animaux de compagnie ?

13 juin 2009

Si vous n´avez rien à dire

Si vous n´avez rien à dire
pas de crayon pas de papier
pas de conscience sociale
et pas la moindre idée

si vous n´avez pas de souvenirs
de cigales de genêt ni de terre labouré
si vous n´avez jamais eu la peur
de perdre votre emploi mal payé

alors

avec habilité et persévérance
et quelques relations bien placées
vous pouvez devenir académicien
ou encore et pourquoi pas
menteur des quatre chemins
comme nos élus et leurs avocats
pourvu, trou du c... que ce soit du bon français...

11 juin 2009

...de MADI

J´ai connu en 1952, à Buenos Aires, le peintre uruguayen Carmelo Arden Quin lors d´une réunion, dans un café du centre ville, du groupe “poesía buenos aires”. C´est la première fois que j´ai entendu parler de Madi. Carmelo étant parti vivre à Paris dès 1953, ce n´est que trois ans plus tard que je le rencontrais à nouveau dans son atelier de Montparnasse et aussi dans l´atelier d´ébénisterie de sa femme avec son compatriote Volf Roitman. Je n´avais alors jamais entendu parler de
Gyula Kosice qui est, selon les uns, le co-créateur de Madi et, selon les autres, l´inventeur de ce mouvement.
Madi est, d´après les partisans de Carmelo Arden Quin, une contraction de “matérialisme dialectique”, mais selon Gyula Kosice, qui est resté en Argentine pendant la chasse aux “communistes”, ce nom viendrait de “Madrid”. Etant donné que ce mouvement s´inspire des recherches des concrétistes russes, du Bauhaus et quelque peu de Schwitters et de Mondrian on peut se demander que vient faire Madrid dans ce contexte !
Gyula Kosice, surtout connu pour ses sculptures “d´eau” (d´ingénieuse fontaines transparentes) je ne l´ai rencontré que vers la fin des années 80. Je suis allé le voir dans son atelier, pour obtenir de la documentation pour une thèse et lui acheter un petit dessin pour offrir. C´était la veille d´une fête et son apprenti, un très jeune garçon, lui demanda s´il pouvait lui donner une petite avance pour le week end. Il lui refusa sous prétexte du manque d´argent. Je venais de lui laisser plus de 200 dollars ! Depuis je crois plus à Carmelo Arden Quin qu´à Kosice.

28 mai 2009

LE SOLDAT INCONNU

La flamme du soldat inconnu
illumine les médailles
de ceux bien connus
qui cultivent la grisaille
des longs couloirs
du moulin à papier
de multiples tiroirs

et qui gèrent les défilés
et le triste sort
des soldats morts
dans les tranchées.

26 mai 2009

L’humanité couleur pétrole

Chaque fois que la haine
remplace la raison
chaque fois que la religion
développe la haine.

Chaque fois que les menaces
remplacent le dialogue
chaque fois que la violence
remplace le compromis

Chaque fois que les plus forts
écrasent les plus faibles
chaque fois qu’un peuple
devient l’otage de la faim.

C’est le prix à payer
me dit le pompiste
pour que vos voitures
roulent il faut des morts

Aujourd’hui la civilisation
a la couleur du pétrole
demain les morts
iront à pied
chez le pompiste

24 mai 2009

...du métier d´artiste

Je crois que c´est Manet qui disait : “Il faut décourager les jeunes artistes”. Ma mère ne le savait pas, mais quand je lui ai dit que je voulais entrer à l´Ecole des Beaux Arts de Buenos Aires elle a tellement pleuré que j´y ai renoncé. J´ai continué mes études d´ingénierie mécanique. Bien qu´il y eut une époque où on parlait des “arts mécaniques” comme on parlait de “l´art de la guerre” (des artistes peintres de génie, comme Léonard de Vinci, les pratiquaient tous) je n´ai jamais trouvé, dans toutes mes années d´étude et de travail, un sujet de conversation intéressant sur mon métier. Je ne connais personne qui ait conquis l´amour d´une fille avec des formules mathématiques ! Einstein, peut-être, mais il reste l´exception. D´ailleurs j´ai rarement rencontré, dans mon milieu de travail, des collègues ayant une culture générale et un esprit ouvert. La technique, de plus en plus spécialisée et complexe, sollicite de l´ingénieur, pour être performant et efficace, toute son énergie. Un ingénieur suédois me disait : “Quand je lis un roman j´ai la sensation de perdre mon temps. Un livre technique me sera bien plus utile pour mon travail”. On demande à l´ingénieur, selon la logique tayloriste, des objets de plus en plus sophistiqués, pour un prix de plus en plus bas, sans lui donner l´occasion d´analyser ni leur utilité ni leur effet sur la société et l´environnement. Je pense que peu de techniciens se posent la question sur, par exemple, l´impact négatif de l´automatisation sur emploi. Mais est-ce que beaucoup d´artistes modernes se posent la question sur l´utilité sociale de leur art ?...

19 mai 2009

...d´académisme

Jusqu´a la fin du XIXème siècle l´Académie des Beaux Arts dictait les critères du grand Art. Les prix qu´elle distribuait, dans les Salons, étaient pour les artistes une ouverture sur le marché de l´art de l´époque. Sans la reconnaissance des Académiciens, pas de commandes officielles et peu de clients privés. C´était donc des artistes consacrés qui distinguaient de jeunes artistes. Cette sélection corporative, héritée du compagnonnage, pourrait être considérée comme normale et sans doute juste, car qui mieux qu´un peintre pour juger un autre peintre ? Ce ne fut pas le cas, car les “maîtres”, eux-même issus de ce processus de sélection, privilégièrent opiniâtrement plus la technique et le choix du sujet que l´originalité d´exécution. Le résultat fut la sclérose du style “académique” à une époque où tout changeait rapidement dans l´industrie, la consommation et les moeurs. L´art restait figé au anciennes normes du classicisme. De là sa déchéance. Ce n´est donc pas étonnant que toute une génération de jeunes artistes se révolte et qu´ils soient aussitôt remarqués et soutenus par quelques esprits brillants et progressistes de l´époque et par des amateurs d´art, en particuliers américains, qui avaient une longueur d´avance dans le modernisme.
Est-ce mieux aujourd´hui pour l´art et les artistes ? Est-ce que les fonctionnaires de la culture, les critiques parisiens renommés, les “conservateurs” de musées sont plus libres, plus éclairés, plus compétents pour juger la création contemporaine que les académiciens du XIXème siècle ? Parfois nous en doutons !...

01 mai 2009

Le marigot

Dans le boue du marigot
dans l’eau noire des rias
il y a des crapauds
et des Ave Maria

il y a tout un monde
dans la boue et dans l’eau
il y a des tombes
il y a des cadeaux
dès que le riz sort la tête
et le filet le tilapia
dès que les grosses crevettes
nagent dans l’huile du plat.

il y a aussi les jours de fête
la musique et le vin
qui reflètent en cachette
et tombent dans le ravin
et tombent sur la tête
dans l’eau noire des rias
c’est le destin des plus bêtes
le destin des parias
de pleurer les jours de diète
et de maigrir le mardi gras

c’est le destin des plus démunis
de vivre dans le marigot
car pour avoir du poisson et du riz
on doit prier les pieds dans l’eau.

27 avril 2009

...d´art engagé

Très tôt j´ai eu le tort de m´intéresser à l´Art et à la politique. Le premier tableau que j´ai acheté, au début de 1960, en Argentine est le puissant portrait d´un gréviste de Ricardo Carpani (1930-1997). Ce peintre muraliste, principal animateur du groupe Spartacus et théoricien de l´art engagé en Amérique Latine, ne pouvait pas concevoir un art purement décoratif et sans contenu. Suivant l´exemple de Rivera, de Orozco et de Siqueiros au Mexique, lui et son groupe d´amis - dont Di Bianco fut le plus fidèle - firent des peintures murales partout où ils trouvèrent des surfaces disponibles. Ils demandaient, pour leur travail, la peinture et le salaire minimum d´ouvrier. Je n´ai jamais pu voir ces peintures in situ : elle furent toutes détruites par les dictatures militaires en Argentine.
Cette peinture puissante, porteuse de révolte et de résistance, n´a pas duré longtemps. Les meilleurs artistes de gauche, souvent menacés par la police politique et par la haine des patrons, durent s´exiler ou se transformer en peintres de chevalet pour survivre.
La vague d´apolitisme dans l´art et la poésie en Argentine - et même ailleurs - est le résultat d´années de censure, d´intimidations et de persécutions que subirent - et subissent encore - les artistes les plus engagés dans le monde dit “libéral”.
Carpani ne renonça jamais. Jusqu´à la fin de sa vie il réalisa des peintures murales et des tableaux de lutte. Célèbre dans son pays et admiré dans beaucoup d´autres, il est néanmoins l´un des artistes argentins connus et reconnus parmi les moins cotés sur le marché de l´art.

20 avril 2009

La grande poésie

La grande poésie
est faite
d´un grand nombre
de petites poésies
de poésie honnête
bien faite
par de petits poètes
de bonne volonté
qui par addition
ou par adhésion
deviendront un jour
peut-être
de vrais grands poètes
mais ils ne le sauront
jamais
car la vraie poésie
la poésie immortelle
la divine poésie
reste un mystère
infini et maudit
puisque personne ne sait
reconnaître avec certitude
la vraie grande
poésie
sauf peut-être
quelques rares poètes
pleins de doute
sur la poésie
d´aujourd´hui

15 avril 2009

...de galeries d´art

Pour ouvrir une galerie d´art il faut être très riche ou très naïf, mais dans tous les cas il faut aimer l´art et les jeunes artistes. Une galerie est une façon de faire vivre l´art mais rarement une manière de vivre de l´art. Diriger une galerie permet de comprendre deux choses :
a) Les artistes deviennent parfois nos amis mais le plus souvent, les plus ambitieux, trahissent leur marchand pour exposer dans des galeries plus prestigieuses ou simplement plus riches.
b) Les collectionneurs aisés sont moins nombreux que les artistes.
Avant la généralisation de l´ordinateur, dans une galerie dynamique, on passait la plus grande partie de son temps á remplir des enveloppes pour les invitations et a accrocher et décrocher des tableaux. La plupart des visiteurs étaient soit de simple curieux, soit des amis ou encore des artistes à la recherche de galerie. Pour une raison mystérieuse et assez décourageante, malgré tous les efforts du galeriste pour présenter des oeuvres de qualité, rarement les ventes arrivaient à couvrir les frais de la galerie et encore moins ceux d´un jeune artiste.
Quand nous avons ouvert notre galerie en Suède nous avons décidé de présenter ce que nous connaissions le mieux : les artistes des pays latins. Nous avons appelé, tout naturellement, notre galerie : “Latina”. Puis tous les ans nous parcourions le grand Salon d´Automne à Stockholm pour essayer de découvrir de nouveaux talents de l´intérieur du pays. C´est ainsi que nous avons aussi donné leur chance à de magnifiques artistes de province.

05 avril 2009

...de collection d´art

Beaucoup de gens pensent que collectionner des tableaux est un luxe réservé aux riches. Oh, combien ils se trompent ! L´art, est même le grand art, avant de devenir un objet de spéculation est très abordable.
L´une des plus belles collections privées de Suède a été réalisée par un artiste plutôt pauvre, mais d´un goût raffiné et saisi d´une vraie passion pour les oeuvres d´art. Il a construit sa collection à base d´échanges et de séduction. Peu d´artistes suédois, dont certains très connus, lui ont refusé leurs tableaux contre un de ses collages ou une de ses sculptures. Je ne dirai pas son nom pour éviter qu´il soit cambriolé (il n´a pas les moyens de payer des assurances) mais mon cher Ian, je n´oublierai jamais l´émotion ressentie devant chaque mur et chaque coin de ta maison au milieu de la campagne.
Aucune institution officielle n´offre en Suède - ni ailleurs - une telle concentration de tableaux et de sculptures avec tant d´art, de beauté et de charge émotionnelle. Toute sa collection vibre comme un instrument à corde.
L´art acquis avec passion, par un collectionneur, est au-dessus de toute considération critique ou financière: l´art choisi avec amour dépasse de beaucoup les critères du marché de l´art. Et, j´insiste, avec très peu de moyens et beaucoup de passion n´importe qui peut commencer une collection de gravures et de dessins de jeunes peintres. J´ai vu partir des cartons pleins de beaux dessins dans une vente à la salle à Drouot pour 200 ou 300 euros. Le prix d´un repas dans un restaurant gastronomique à Paris !...

03 avril 2009

...du monde de l´art

Je viens de relire tout un vieux dossier sur la situation de l´art contemporain en France et celui de ses acteurs et le bilan est plutôt inquiétant. Il y a, depuis quelques années, deux mondes séparés par un mur plus hermétique que celui de Berlin ou de Tijuana : celui des artistes renommés et celui des artistes ignorés. Les renommés sont de plus en plus chers et peuvent arriver à des prix dépassant les Rubens ou les Goya et les autres, d´une qualité et d´un parcours pourtant égaux, n´arrivent plus à vendre leurs oeuvres.
Les mécanismes du commerce de l´art fonctionnent aujourd´hui selon des critères tout à fait autonomes, mystérieux et très proches de ceux de la spéculation boursière. Les règles du jeu du marché de l´art n´ont pas d´autres repères que ceux de leur valeur aux enchères. Ce ne sont plus, comme jadis, les galeries indépendantes les découvreurs de talents. Ces galeries ont peu à peu fermé - car elles n´arrivent plus à vivre - et sont remplacées par des financiers à la recherche de “coups”. Ils achètent, par exemple, toute l´oeuvre d´un peintre qui a un bon curriculum mais pas de marchands, pour un prix disons d´un quart de sa valeur ; puis ils multiplient par dix leur valeur de vente en rachetant leurs propres tableaux aux enchères à New York pour avoir une “cote”. Ensuite ils commencent une tournée dans toutes les grandes villes de province des Etats Unis pour écouler leur stock à 20 ou 30.000 dollars chaque tableau. Si ça marche, l´artiste concerné peut vivre plusieurs années sur la lancée. Si ça échoue l´artiste ne vendra plus rien de toute sa vie...

01 avril 2009

Ils vont et ils viennent la nuit

Les automobiles roulent fatiguées.
Un enfant appelle sa mère.
L´ascenseur cliquette péniblement
dans la nuit épaisse du lundi.

26 mars 2009

...d´art national

Existe-t-il aujourd´hui un art national ? Il existe certainement quelque part, mais c´est l´art international qui domine dans les médias, les Musées et les galeries. Je ne sais pas très bien pourquoi l´art apolitique, clinquant et néodadaïste à la mode serait plus “international” que celui d´artistes plus respectueux du métier de peintre et, surtout, plus personnels et individualisables comme par exemple Bacon ou Millares ! Par ailleurs est-ce que Van Gogh, Picasso, Mondrian, Kandinsky seraient devenus aussi célèbres s´ils étaient restés dans leur pays d´origine ?
Une autre question : chez eux, ces artistes, auraient-ils pu développer une telle force et une telle originalité dans leur oeuvre ?
Je pense que dans chaque artiste créateur il y a deux personnalités en conflit : l´une celle de l´enfance, plus régionale et plus conservatrice et l´autre ouverte au monde et en lutte pour sortir des normes traditionnelles. La rupture se fait mieux à l´étranger, mais elle ne peut être utile que dans la mesure où l´artiste ne renie pas ses racines. C´est ainsi qu´il maîtrisera ses propres contradictions et en fera une synthèse positive.
Donc on pourrait dire que la personnalité d´un artiste vient de ses origines culturelles mais que la création de son style vient de ses rencontres d´adulte... hors de son contexte. Selon ce raisonnement l´art international serait celui qui sait rendre universels les souvenirs de jeunesse. C´est précisément de cette ambigüité que naît l´art qui change notre vision du monde et non de l´imitation de la dernière mode à New York.

18 mars 2009

...de ses rencontres à Paris

A Paris la solitude est plus dure qu´ailleurs car les gens n´ont pas le temps pour se faire de nouveaux amis. Puis le Français est par nature méfiant. Dans tous les pays d´Europe que j´ai connus, si vous arrêtez quelqu´un dans la rue pour demander un renseignement il prend le temps de vous expliquer et même, parfois, il vous accompagne un bout de chemin. A Paris les gens ont, presque toujours, un mouvement de recul. On perçoit qu´ils se sentent agressés et s´il s´agit d´un étranger qui les interroge, en mauvais français, alors c´est la panique et sous prétexte de ne pas comprendre ils s´enfuient ! Comment alors, si vous êtes seul, faire des contacts en France hors de votre milieu professionnel ? Il faut parler d´autres langues car vous finirez toujours par trouver, dans la foule pressée, un étranger qui cherche un contact humain. Moi j´ai rencontré mes premiers copains à Paris dans une station de métro. J´ai entendu parler le castillan avec un accent du Río de la Plata, je me suis approché et je me suis présenté. J´ai ainsi rencontré un Argentin et un Chilien qui ont bouleversé tout mon avenir. Sans eux je ne serais jamais allé en Suède. Mais c´est une autre histoire !
Le Chilien était un brillant journaliste connu sous le pseudonyme de “El Perro”. Il s´agissait de Augusto Olivari, qui est mort plus tard à côté du Président Allende lors de l´assaut des militaires au Palais de la Moneda. Il habitait alors à l´hôtel Saint-Michel et il envoyait ses articles à la presse chilienne. Il avait plusieurs maîtresses, il buvait beaucoup et il parlait très bien d´André Malraux. C´était un vrai latino-américain bohème de Paris

17 mars 2009

La pourriture

Baudelaire qui pourrissait du dedans
parlait avec une certaine jouissance de la pourriture
en connaissance de cause...

Je connais un poème qui parle
longuement méticuleusement
de la pourriture d'une orange.

J'ai vu un jour le cadavre pourrissant d'un cheval
au bord d'une belle rivière
au pied de la Cordillère des Andes
un porc en liberté le dévorait goulûment.

J'ai vu à la télévision des cadavres pourrissant
dans les tranchées
de multiples guerres coloniales organisées
par les gouvernements des pays les plus civilisés.

Pourtant
je ne trouverai certainement pas de revue de poésie
qui veuille dans l'état actuel de la culture occidentale
publier un poème sur la pourriture.

13 mars 2009

...de Bruxelles


Que puis-je dire de Bruxelles ? Nous avons très peu vécu dans notre appartement de la rue Wielemans Ceuppens, proche du magnifique parc de Forest. Nous avons quand même compris, assez rapidement, que certains quartiers de la ville appartenaient aux Turcs ou aux Marocains. Contrairement à Paris, de nombreux Belges de souche avaient émigré dans la banlieue ! Pourtant jamais nous nous sommes sentis menacés. Nous étions au contraire plutôt surpris de la gentillesse des gens que nous interrogions, parfois, dans la rue quand nous cherchions une adresse. Nous avons aussi découvert au centre ville, près de l´arrêt du tramway, un immense café, très kitch, où de vieilles dames en chapeau venaient boire le thé et manger de petits gâteaux. Il y a Bruxelles comme un air calme de province, malgré l´intense circulation.
Mais notre plus grande admiration fut quand nous visitâmes les bouquinistes ! Dans notre quartier, à quelques centaines de mètres de notre appartement, il y avait une énorme boutique, bien organisée, avec 40.000 volumes à vendre. Après de longues recherches, nous la quittions avec des sacs pleins de livres. C´est d´ailleurs dans cette librairie que j´ai trouvé un livre que je cherchais depuis plus de vingt ans : “La poésie surréaliste” de Jean-Luis Bédoin, édité en 1964 par Seghers. La dernière fois que nous sommes allés à Bruxelles nous avons appris qu´elle avait brûlé ! Ce fut comme l´annonce du décès d´un bon ami. Notre quartier avait perdu une partie de son charme. J´ai visité plus tard d´autres grands libraires de livres d´occasion, mais ce n´était pas pareil !

04 mars 2009

Les artistes créatueurs

"Les artistes créatueurs"
De remise en question
en restructurations profondes
la montagne du doute
mord de ses longues dents
la pomme verte et carrée
inondée de sueur et de sang
parmi ombre et mystère
illusion trop éphémère
d´un paysage intérieur lointain
qui accable l´artiste créatueur
de l´avant-garde de demain.

01 mars 2009

L'érudition moisie

Toute une vie d'études austères
toute une vie de livres
et de poussière
vouée au passé
et aux vieilles pierres
par ĺodeur alléché
d'un riche vocabulaire
entre deux ruines
et quelques vieux cimetières...

Pas un rêve vivant
pas un poète présent
pour nous faire aimer
le vrai sens du mystère.

27 février 2009

...de Lectoure
















Il y a en Gascogne une région qui s´appelle la Lomagne. Et au centre de la Lomagne il y a la célèbre ville de Lectoure.
Comment, vous ne connaissez pas Lectoure !!! C´est le Saint-Tropez des champs de tournesols. Ancien centre administratif et militaire romain la ville, fortifiée, fut trois fois détruite : une par la Wisigoths, la deuxième sur l´ordre de Louis XI, roi de France, et la troisième sur ordre du Pape car elle était devenue protestante. La ville actuelle est construite sur les cendres et les cadavres de vingt siècles de brutalité et d´intolérance. Doit-on être surpris de la méfiance des indigènes pour tout ce qui vient d´ailleurs ?
A Lectoure on veut bien vous vendre, très cher, une vieille maison en pierre et même vous saluer dans la rue, mais ne vous attendez surtout pas qu´on vous invite à boire, ne serait-ce qu´un café, chez l´habitant !
Tout en étant socialiste, la ville de Lectoure, est très conservatrice. Les Lectourois aiment beaucoup leurs traditions gasconnes et ne veulent surtout pas que des étrangers veuillent, en quoi que ce soit, les faire évoluer. La culture gasconne consiste essentiellement à manger du foie gras et du magret de canard, cueillir des champignons en automne et soutenir le club local de rugby. Pour le reste, comme tous les peuples civilisés, ils font leurs courses au supermarché et regardent le soir la télévision.
Lectoure est une très belle ville. Une revue parisienne l´a placée parmi les quatre villes, à l´intérieur des terres, les plus agréables de France. C´est certainement vrai car nous y sommes restés une dizaine d´années

25 février 2009

Cap Vert

Cap Vert sel et pierres
mer et rochers
l'eau partout l'eau rationnée
îles îles et volcans
hier la famine
aujourd'hui le vent
sec du désert.

Cap Vert la mer
Cap Vert le sang
métisse qui brûle dans tes veines
capverdiennes au regard brûlant.

Et tes rêves de départ
de nouvelles rives
de mousse et de brouillard;

Et tant de cérémonies
inutiles et stériles
pour un peu de pluie...

Je donnerai mon sang
pour une rivière
qui coule claire
sous un pont en acier
dans une verte
très verte vallée.

Loin du Sahel va ma prière
trop de soleil c'est trop
Dieu donne-nous un nuage
donne-nous un peu d'eau...

Mais Dieu est de plus en plus sourd
aux prières des pauvres
il ne veut plus écouter
ou alors il ne sait plus
distinguer la souffrance;

il croit que les larmes
des enfants du Cap Vert
vont arroser les pierres
comme une pluie d'été.

22 février 2009

...de Guatemala ciudad

Dans une rue de Santa Catarina - ethnie Cakchiquel
CHAJUL (huipil) Ethnie IXIL











La capitale du Guatemala n´a rien de pittoresque. C´est une ville avec des quartiers d´immeubles parfois plus modernes et luxueux que ceux des grandes villes européennes et, comme dans beaucoup de pays du tiers-monde, des zones sordides et inquiétantes.
Dans notre quartier bourgeois, la zone nº 10, personne ne se promenait à pied ! On ne rencontrait dans la rue que les bonnes indigènes qui allaient faire les courses. A tout moment on risquait, à Guatemala ciudad, de se faire attaquer. Comme tout le monde est armé, les voleurs, pour effrayer leurs victimes, le sont aussi. C´est le cercle vicieux de la violence. Pourtant les gens que l´on côtoie, dans la vie de tous les jours, sont très courtois et plutôt aimables. En cas de conflit personne ne crie ou gesticule car tout le monde sait que, comme dans les westerns, c´est le plus rapide au pistolet qui a raison. Je pense qu´au Guatemala, même les descendants de Napolitains se font discrets !
Bien que les rues soient peu animées, les restaurants et les centres commerciaux protégés par des gardes armés, sont le lieu de rencontre des classes moyennes. On peut y manger de la très bonne viande grillée et acheter tous les produits de consommation courante les plus sophistiqués. Il y a aussi, dans le centre historique de la ville, un immense et magnifique marché de l´artisanat indigène. Je pense qu´il y a deux sortes de personnes intéressantes au Guatemala : les indiens et les amis des indiens. Sans cette riche et merveilleuse culture Maya le Guatemala serait un pays sans fantaisie..

16 février 2009

Paul Eluard (1895-1952)

- Rien de plus affreux que le langage poétisé, que les mots trop jolis gracieusement liés à d´autres perles. La poésie véritable s´accommode de nudités crues, de planches qui ne sont pas de salut, de larmes qui ne sont pas irisées. Elle sait qu´il y a des déserts de sable et des déserts de boue, des parquets cirés, des chevelures décoiffées, des mains rugueuses, des victimes puantes, des héros misérables, des idiots superbes, toutes les sortes de chiens, des balais, des fleurs dans l´herbe, des fleurs sur les tombes. Car la poésie est dans la vie. (...)
(“Les sentiers et les routes de la poésie”)

Note : J´hésite à le dire, mais une grande partie de la poésie publiée dans les revues que je reçois m´ennuie. J´ai la sensation, depuis des années, de lire, sous différentes signatures, le même poème. C´est tellement rare de trouver un poème original, sincère, vécu que, pour en trouver un, de temps à autre, j´en lis énormément. Je ne cherche pas nécessairement des poèmes engagés, révoltés par l´injustice, par la misère, par l´exploitation de l´homme par l´homme car ils sont pratiquement inexistants en France. Il y a tout au plus des poètes qui se désolent de tant de pauvres et de victimes et demandent plus de bonté et de générosité...aux bourreaux. Aucun poème ne parle ouvertement de combattre, par la parole, les responsables menteurs et profiteurs, les fabricants de famines et de guerres Aucun poète ne semble s´inquiéter des programmes“culturels” destinés à détruire la parole libre, la parole indépendante. Peu de poètes semblent s´émouvoir de vivre une poésie bâillonnée.

voir Paul Eluard suite

07 février 2009

...de Bissau

Je suis arrivé à Bissau au mois de mai 1978. La chaleur et l´ atmosphère, dans le hangar de l´aéroport, étaient étouffantes. Si j´en avais eu les moyens je serais reparti, tout de suite, avec le même avion. C´est la vue d´une famille de suédois qui me rassura. Si eux pouvaient supporter le climat moi aussi je m`y habituerai.
La ville ressemblait à un film sur le début de la colonisation de l´Afrique. Ma petite maison, au centre de la ville, était au bord d´une rizière. Quand il pleuvait beaucoup on pouvait voir des poissons dans la rue et parfois des serpents et des varans visitaient notre petit jardin. Ils devaient se nourrir des rats qui, eux, se partageaient, avec les vautours, les ordures qui traînaient parfois plusieurs semaines sur les trottoirs ! Un soir, en promenant le chien, j´ai rencontré, dans notre rue, un ragondin tellement gros que le chien, pourtant courageux, à fait semblant de ne pas le voir.
La plupart du temps il n´y avait pas de lumière le soir. Par contre nous bénéficions d´une employée de maison, la grosse et redoutable Adelina, et d´un vieux jardinier, N´Dona, qui faisait des économies pour s´acheter une deuxième femme. Ils furent nos “fidèles serviteurs” pendant tout notre séjour. Je pense que c´est en partie grâce à leur protection que nous n´avons jamais été malades et, pour des blancs, très modérément volés.
Le chantier que je dirigeais, au début, se trouvait sur la route de l´aéroport à la sortie de la ville. Une nuit ce furent les hyènes qui ont failli dévorer notre gardien.
Pourtant nous sommes restés 13 ans à Bissau et nous en sommes partis en pleurant !!!

05 février 2009

La vie

C'est la vie !
Répètent sans cesse les survivants
de la nuit.

C'est la vie
quand tout va mal
et quand il pleut à torrents
sur le trottoir gluant
de la déchéance
sans amour
sans espoir
et la crasse la crasse
qui vous bouffe la vie.

C'est la vie !
Quand on tombe dans le ruisseau
gris de la dernière pluie
l'alcool qui vous sert de lit
qui vous sert d'oubli
sans un toit
sans amis
et la crasse la crasse
qui vous bouffe la vie.

D'ailleurs :
Est-ce vraiment une vie ?...

03 février 2009

Je pourrais aussi vous parler de mon âme

Je pourrais vous parler de guerre
des morts en Afrique ou en Irak
du chômage en France des sans abri.

Je pourrais vous parler du gâchis
des inondations des incendies
de la sécheresse et de la messe
du CAC-40 et du couac 2040
(la fin annoncée du pétrole bon marché)
mais aucun éditeur de poésie
ne voudrait de mon poème
toton tontaine, que nenni !

Pourquoi parler de choses vilaines ?

Raconte-moi ton âme profonde
et parle d´oiseaux et de fontaines
et tu n´auras que des amis, poète,
toton tontaine, et quels amis !...

01 février 2009

Le poète qui vous parle...de Buenos Aires

















Un ami argentin, Cirilo San Miguel, me disait : “L´Argentine est peuplée de frustrés. La frustration des émigrants qui n´ont pas réussi”. Je suis arrivé à Buenos Aires sans connaître un seul mot d´espagnol, mais dans la rue j´ai vite appris le “lunfardo”, l´argot “porteño” des tangos de banlieue. Jamais à Buenos Aires je me suis senti étranger. Frustré ? Oui, peut-être un peu. Mais pas par le pays qui m´a donné plus que tout autre. Les Argentins étaient les gens le plus généreux de la terre. Le rite du maté en était le symbole. Le plus pauvre des pauvres vous offrait, dans son taudis, une tournée de maté.
Les décennies 40 et 50 furent pour l´Argentine des années de grandes transformations. La guerre en Europe favorisa, dans le pays, une plus grande autonomie politique, économique et culturelle. L´Argentine découvrit ses propres potentialités tout en recevant, à travers l´émigration récente, un souffle de modernité. Pendant que les nazis et les fascistes persécutaient tous les intellectuels les plus progressistes d´Europe, l´Argentine les accueillait avec admiration et respect. Le surréalisme, l´expressionnisme, l´art concret, l´art engagé faisaient leur entrée dans l´art, la poésie, la littérature et le théâtre à Buenos Aires. Ce fut une époque extraordinaire de création. Même le folklore et le tango ont bénéficié de ces influences d´avant-garde, leurs donnant une dimension universelle. Les Argentins étaient entrés dans la vrai modernité avant les nord-américains. On ne leur pardonnera pas. Quelques années plus tard les artistes et les intellectuels argentins payeront très cher leur audace.

29 janvier 2009

Le poète qui vous parle...de la guerre

Je suis arrivé à Buenos Aires en 1941, avec mes parents, après un très long voyage. La France était occupée par les Allemands et son nouveau gouvernement, composé de canailles politiques et de milliers de dociles fonctionnaires, obéissait aux ordres de l´envahisseur. Certains même faisaient du zèle. La Résistance ne concernait, alors, que quelques farfelus comme De Gaulle et son équipe de “terroristes”. Les Français moyens collaboraient. Que pouvaient-ils faire d´autre ?
Tout monde n’a pas une vocation de martyr, n´est-ce pas ?
L´Argentine, comme l´Espagne, le Portugal et la Suède, gardèrent une stricte neutralité qui dura jusqu´à la défaite des Allemands. Ce n’est que vers la fin des hostilités que l´Argentine déclara la guerre à l´Allemagne. Cette période de l´histoire, comme bien d´autres, est pleine de souvenirs déshonorants pour certains et héroïques pour d´autres. Mais tout est vite oublié. Que pouvons-nous faire disent, en guise de justification, les mêmes qui continuent à subir, sans protester, tous les abus de leurs employeurs et de l´Etat ? La politique, comme la bonne poésie, ne se fait pas avec des bons sentiments, nous dit-on. Soyons donc de prudentes et dociles victimes !
L´Argentine officielle était partagée. Les militaires et les descendants d´Allemands étaient pro-germaniques, mais curieusement, l´aristocratie argentine était plutôt favorable aux alliés car très influencée par la culture française. Paris, avant la guerre, était un lieu de passage presque initiatique pour les riches Argentins. La libération de Paris fut une grande fête à Buenos Aires. J´y étais !

23 janvier 2009

(suite de Paul Eluard)

Le surréalisme travaille à démontrer que la pensée est commune à tous, il travaille à réduire les différences qui existent entre les hommes et, pour cela, il refuse de servir un ordre absurde, basé sur l´inégalité, sur la duperie, sur la lâcheté. (...)
Il y a un mot qui m´exalte, un mot que je n´ai jamais entendu sans ressentir un grand frisson, un grand espoir, le plus grand, celui de vaincre les puissances de ruine et de mort qui accablent les hommes, ce mot est : fraternisation.
En février 1917, le peintre surréaliste Max Ernst et moi, nous étions sur le front, à un kilomètre à peine l´un de l´autre. L´artilleur allemand Max Ernst bombardait les tranchées où, fantassin français, je montais la garde. Trois ans après, nous étions les meilleurs amis du monde et nous luttons ensemble, depuis, avec acharnement, pour la même cause, celle de l´émancipation totale de l´homme.
La poésie véritable est incluse dans tout ce qui affranchit l´homme de ce bien épouvantable qui a le visage de la mort. Elle est aussi bien dans l´oeuvre de Sade, de Marx ou de Picasso que dans celle de Rimbaud, Lautréamont ou de Freud. (...)
(Extraits d´une conférence de Eluard, à Londres, en 1936)

Note : Que dire de ce texte de Paul Eluard sinon qu´il est exemplaire d´une époque où le poète était entièrement imprégné et se sentait concerné par la réalité sociale et politique de son pays ! Son engagement politique n´était pas contradictoire avec son engagement artistique d´avant-garde car il était un vrai grand poète !

09 janvier 2009

La poésie qui démolit les murs

Paul Eluard (1895-1952)
N´usant des contradictions que dans un but égalitaire, la poésie malheureuse de plaire quand elle se satisfait d´elle-même, s´applique, depuis toujours, malgré les persécutions de toutes sortes, à refuser de servir un ordre qui n´est pas le sien, une gloire indésirable et les avantages divers accordés au conformisme et à la prudence. (...)
Ceux qui viennent ici pour rire (Note : il s´agissait d´une exposition d´art surréaliste), ou qui s´indignent, ceux qui devant la poésie surréaliste, écrite ou peinte, pour cacher leur incompréhension, leur peur ou leur haine, parlent de snobisme, sont les mêmes que ceux qui torturaient Galilée, brûlaient les livres de Rousseau, affamaient William Blake, condamnaient Baudelaire, Swinburne et Flaubert, déclaraient que Goya ou Courbet ne savaient pas peindre, sifflaient Wagner et Stravinsky, emprisonnaient Sade. Ils se réclamaient de la sagesse, du bon sens, de l´ordre, pour mieux satisfaire leurs ignobles appétits, pour mieux exploiter les hommes, pour les empêcher de se libérer, pour mieux les avilir et les détruire par l´ignorance, par la misère et par la guerre. (...)
On ne possède aucun portrait du marquis de Sade. Il est significatif qu´on n´en possède non plus aucun de Lautréamont. Le visage de ces deux écrivains fantastiques et révolutionnaires, les plus désespérément audacieux qui furent jamais, plonge dans la nuit des âges. (...)
(Note . Voir plus loin la suite. Paul Eluard : Un grand, très grand poète !)

06 janvier 2009

Notre jardin brésilien



















Notre jardin est tout petit
quelques mètres cultivés
sur plusieurs plans et degrés
jardin sur rue pour les passants
jardin intérieur pour l´intimité
et pour quand il pleut à verse
et que souffle très fort le vent
quelques fleurs en pots
pour chasser la tristesse.

Mais notre petit jardin
ce minuscule jardin de poupées
est une forêt amazonienne
dense, touffue, envahissante,
pleine d´arbres et de plantes
de massifs et de haies
aux parfums saisissants
comme du Chanel renversé
car à Goiânia il fait chaud,
ici l´été dure toute l´année.

Notre petit jardin est aussi
est un lieu de rencontre
pour les fleurs et les papillons
pour les abeilles et les bourdons
et pour de légers colobris
visiteurs de corolles variées
aussitôt arrivés ils s´enfuient.
Nos arbres toujours verts
accueillent tous les matins
une nuée de bavards perroquets
et le scandaleux “bentiviii”...
pendant que de fines tourterelles
font un petit nid sous la tonnelle
et de nombreux oiseaux de passage
aux trilles gaies de canaris
ou aux plaintes de bandonéon
chantent, s´interpellent, crient,
comme dans une forêt sauvage
au centre même de l´Amazonie.

C´est un infime jardin
qui déborde sur le trottoir
et qui sert de cachette
aux timides lézards
aux escargots aux insectes
et à notre rusé chat noir.

Ne me demandez pas
le nom des plantes
ni celui des oiseaux
notre chat s´appelle Charlie
notre maison n´a pas de numéro
parfois c´est mieux ainsi
quand on est deux et on s´aime
depuis plus de quarante ans
en Amazonie ou à Paris
car quand ont s´aime vraiment
tous les jardins sont des paradis

03 janvier 2009

Le poète qui vous parle...d´ Antibes














Antibes, est d´après moi la meilleure ville de la Côte d´Azur pour vivre à l´année. Dans cette région de tourisme saisonnier, la vieille ville d´Antibes est aussi animée en hiver qu´en été. Puis le grand nombre d´étrangers à la région permet de se faire, assez facilement, un agréable cercle d´amis. Les autochtones, eux, plutôt méfiants, préfèrent rester entre eux.
Le port est peuplé d´étrangers anglophones qui travaillent sur les nombreux et luxueux bateaux de plaisance. Les bars du port font de bonnes affaires.
C´est dans le château Grimaldi d´Antibes que Picasso peignit sa série de grands tableaux sur la mythologie méditerranéenne, qui devint, grâce à sa générosité et à l´habileté de Dor de la Souchère, le premier Musée Picasso de France. C´est aussi, à une centaine de mètres de là, que se “suicida” le peintre De Staël en se jetant du balcon de sa maison. Certain disent qu´il était, souvent, tellement saoul qu´il serait tombé !
Beaucoup de célébrités littéraires ont séjourné à Antibes. Jacques Audiberti, lui, y était né.
C´est dans une ruelle du vieil Antibes qu´avec Monique nous avons ouvert, en 1969, une galerie d´art, “Art Club”, qui fut pendant huit ans un lieu de rencontre international. De nombreux bons artistes suédois y séjournèrent dont Roland Klang. Puis quelques artistes de la région comme Emile Marzé, Michel Gaudet, Tanagra, Chiaberge, Rose-Marie Klingbeil, Josette Ahime y exposèrent leurs oeuvres et sont, encore aujourd´hui, nos bons amis et nos meilleurs souvenirs d´Antibes.