28 janvier 2012

Le départ de la Guinée-Bissau II

Mon dernier contrat arrivant à expiration – j’avais   61 ans  - j’envisageais le départ à la retraite. Monique, mutée à l´Ambassade du Guatemala, devait travailler encore quelques années. Plusieurs mois avant j´ai commencé à préparer, au Secrétariat d´Etat, mon départ.
J´avais déjà publié plusieurs articles sur les Coopac. Je me suis donné pour tâche, avant de partir, de laisser une documentation qui permettrait à mes successeurs, nationaux ou étrangers, de continuer à soutenir les Coopératives. Nous avions obtenu de l´Etat, avec l’appui du PNUD, la reconnaissance légale des coopératives en Guinée-Bissau. Il suffisait maintenant de continuer, avec la même rigueur, le projet existant et d‘en créer de nouveaux. Dans ce but j´ai écrit et publié "Les projets de développement  (de la conception à l´évaluation). Technique et idéologie" qui donnait la méthode la plus simple pour concevoir et réaliser des projets adaptés à la réalité du pays. Je l’ai largement distribué à toutes les personnes concernées.

Puis j´ai également écrit un livre, destiné aux petites entreprises de construction civile (les Coopac en avaient deux) : "Comment réaliser un devis de construction civile en Guinée-Bissau". Le système de métré pratiqué en Europe, pour le calcul des prix de revient, nécessite des techniciens expérimentés et des tableaux qui ne correspondent pas à la réalité africaine, en particulier quand il s’agit de constructions populaires à bas prix. Il fallait un nouveau système de calcul.
Puis j’ai écrit "Les poèmes du Géba" pour dire, ô combien ! J’aimais le pays que nous allions quitter.

22 janvier 2012

Le départ de la Guinée-Bissau I

               Après 13 ans de loyaux services dans un pays particulièrement difficile le Ministère des Affaires Etrangères (et parfois plutôt étranges...), considéra que mon épouse devait être mutée. Généralement on ne reste "en poste" dans le même pays que trois ans. Nous apprîmes, par la suite, que la remplaçante de Monique ne resta que trois mois. Oui, à Bissau, surtout les premières années, les magasins étaient vides.  Pour survivre nous devions tout faire venir d’Europe ou de Dakar mais, pour conserver la nourriture, notre congélateur était à L’Ambassade. Dans notre quartier nous n´avions que quelques heures d’électricité par jour et jamais le soir !

C´est Adelina, notre cuisinière, qui trouvait chaque jour, sur le marché, quelques poulets "bicyclettes" ou du poisson, pêché le matin même, dans les rizières qui entouraient la ville et qui nous préparait de fines sauces au citron vert qui agrémentaient nos repas du midi. Notre vie était spartiate mais jamais nous n’étions malades. Les quelques blancs, coopérants, experts ou fonctionnaires européens s’invitaient et parfois même s’entraidaient et les rapports, avec les Africains, ne pouvaient pas être meilleurs. Malgré onze ans de guerre, malgré les restrictions et la grande pauvreté, malgré l´énorme différence de revenus entre les bissau-guinéens et les coopérants étrangers, jamais nous n´avons rencontré la moindre agressivité de la part de la population ou des dirigeants du pays. Le mot d´ordre du gouvernement était : "Les blancs viennent pour nous aider !". C´était vrai que certains le faisaient avec compétence et dévouement. D´autres peut-être moins !..

13 janvier 2012

Les Coopac IV

Chaque année les Coopac fournissaient un bilan financier et comptable, détaillé, aux organismes de financement. Ce  bilan avait la vertu d’irriter de Chef de la Mission de Coopération Française car il aurait eu, lui-même, bien du mal à justifier l’utilisation des 40 millions de francs de son budget. Ces fonds "d’aide" servaient surtout à enrichir quelques fournisseurs français et libanais de matériels et de services - à créer des emplois en France aurait dit le Ministre.de la Coopération - Les intermédiaires libanais, très accommodants, faisaient des factures fictives qui permettaient aux responsables de projets (et y compris à certains Chefs de Mission peu scrupuleux) de toucher un pourcentage sur tous les achats réalisés à Dakar. J’en ai même connu un qui achetait du matériel d’occasion et, pour augmenter sa marge, le faisait passer pour neuf ! Pour les vrais escrocs, l´honnêteté n´est qu´un vilain défaut...L´Etat, lui, fermait les yeux !

Les Coopac échappaient à cette tentation car tous les fonds que nous obtenions de diverses ONG et, même d’organismes d´Etat, étaient versés à la CIMADE, une organisation protestante bien connue, qui se chargeait des achats en France et de l´expédition par conteneurs. Toute l’aide que nous recevions se transformait en matériels que les coopératives transformaient, elles, en constructions de maisons populaires, en céramique utilitaire, en meubles, en charrettes, en réparation de frigidaires et de voitures et en productions agricoles dont nous étions, parfois, les seuls fournisseurs dans tout le pays. Les Coopac étaient l’exemple gênant qui montrait que, avec les gens et les structures adéquates, tout est possible en Afrique !

08 janvier 2012

Elections/déception...

J´admire sincèrement
tous les candidats à la Présidence
pour leur courage pour leur discours
pour leur incroyable santé
pour leur charme leur sérénité
pour l´étendue de leurs connaissances
pour leur mémoire sans défaut
pour leurs convictions leur élégance
pour leur sens du devoir
pour leur amour du peuple
pour leur désir de justice et leur honnêteté
pour tout ce qu´ils promettent
pour après...toujours après...

Mais diront-ils un jour
que plus de salaire
c´est aussi la vie plus chère
et qui donc devra payer ?

Que plus de consommation
c´est aussi plus de dégâts
dans un monde déjà épuisé
et qui donc devra payer ?

Quand diront-ils la vérité
peut-être après...les élections ?
Quand il faudra payer !...

01 janvier 2012

Les Coopac III

Les coopératives Coopac étaient sous la tutelle du Secrétariat aux Combattants de la Liberté de la Patrie. Le premier Secrétaire d’Etat et initiateur du projet de coopératives d´insertion - un homme intègre et intelligent - quitta son poste pour devenir Vice-Président du pays. Son remplaçant, un musulman semi-illettré, saisissait mal le concept d’autonomie des coopératives mais continua néanmoins le projet. Plus tard tous deux accusés - avec une dizaine d´autres anciens combattants - de comploter pour renverser le Président, furent fusillés!

Une autre version des faits accusait le Président de "corruption" mais cette affaire, ne concernant pas directement les coopératives,j’éviterai d´en parler  (quelques années plus tard le Président, lui-même, fut assassiné par un membre de l´armée !).

Un obscur fonctionnaire du Ministère des Affaires Etrangères fut nommé Secrétaire d´Etat aux anciens combattants. C´était un homme courtois qui, bien que  handicapé - il avait été gravement blessé au combat - imposait, dans son Ministère, un énorme respect aux fonctionnaires ainsi qu’aux anciens combattants qui venaient, chaque fin de mois, réclamer une assistance. Cet homme intelligent - qui parlait un grand nombre de langues locales et étrangères - renforça l´autonomie, mais aussi la discipline (le moindre détournement était immédiatement sanctionné) dans les coopératives. Puis, par sa rigueur et son honnêteté, il attira le soutien des organismes de coopération de plusieurs pays. Ce fut
l’époque de gloire des Coopac. J´ai eu l’honneur de participer, pendant une dizaine d´années, à ce projet.